Malgré le spitch de départ, la relation entre Sumiré et Momo (dont ce n'est pas le vrai nom...) n'est ni glauque ni désopilante, mais se rapproche plus de la colloc ou du confident à domicile. Cette série traite surtout de la difficulté entre être et paraître, Sumiré étant une femme forte et intraitable aux yeux de ses collègues. Une image qu'elle s'efforce d'entretenir avec tous, même l'homme qu'elle aime, elle ne peut être elle-même qu'avec Momo, où elle se révèle en fait être une femme plutôt sensible, indécise et ne comprenant rien aux relations humaines. Et c'est là ce qui m'ennuie dans cette série. Partant d'un point de vue original, dans un Japon où la norme féminine est d'être délicate, introvertie et où toute jeune femme doit être mariée avant 30 ans et doit avoir quittée son boulot pour s'occuper de son foyer, Sumiré affiche clairement le rôle de la femme indépendante qui s'est acquittée du dictat de la société patriarcale, du fait de son choix de carrière et de son ascendant sur Momo. Après tout, c'est elle qui le loge et le nourrit avec comme seul retour l'étalage de ses peines de coeur et de son incompréhension sociale. L'idée de départ est donc super intéressante, Sumiré aurait pu représenter la femme forte japonaise qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et impose sa vision des choses, mais en fait, pas du tout.
Retombant comme un soufflet, s'arrêtant à être juste une comédie romantique, cette histoire retombe vite dans le classique, Sumiré étant en réalité l'archétype de la femme japonaise en son for intérieur, sa forte personnalité n'étant qu'une façade, et l'inversion personnalité forte vs sensibilité exacerbée devient de plus en plus marquante au fur et à mesure des tomes. Alors certes, les personnages secondaires apportent des moments intéressants sur les relations sentimentales entre adultes, mais même Momo n'arrive pas à relever le niveau, se contentant d'être un confident au début pour évoluer de façon très, trop classique pour une série destinée à un lectorat féminin. Faut avouer que l'auteur aurait pu lui trouver un autre métier, d'autres antécédants et une personnalité plus marquée pour rajouter un peu d'originalité, parce que là, cela donne tellement l'image du prince charmant délicat qu'il n'est plus du tout crédible de mon point de vue.
Bref, j'ai l'impression que l'auteur a touché du doigt quelque chose, une histoire qui aurait pu bien sortir des sentiers battus, mais que la société japonaise, et sans doute l'éditeur, n'était pas près pour ça lors de son écriture en 2000, alors qu'en tant que lectrice adulte occidentale en 2021, j'aurais voulu justement que cela aille plus loin dans la remise en question des convenances et de l'affirmation de la place de la femme dans la société.